samedi 29 mars 2014

Correspondances à Rambouillet

Une partie du groupe des "seniors", au théâtre
Le Nickel, à l'issue d'une des séances
Une vingtaine de jeunes Rambolitains et Rambolitaines de l'école Saint-Hubert ont correspondu avec leurs aîné(e)s d'environ deux générations. Correspondances "anonymes" pour le moment, qui aboutiront le 11 avril 2014 à une rencontre festive au cours de laquelle... il s'agira de deviner qui est son (ou sa) mystérieux(se) correspondant(e).

Cette action, basée sur des ateliers d'écriture que j'ai le bonheur d'animer (avec à chaque rencontre une injonction d'écriture différente basée sur le thème des "premières fois que..."), prend place grâce à la Compagnie de l'Arcade (qui monte le spectacle Le Jardinier, de Mike Kenny, qu'ont pu voir les participants - à l'instar des ateliers menés à Gauchy) et au Théâtre Le Nickel de Rambouillet.

Initiés à l'origine lors de ma résidence d'écriture à Colombes il y a un an, ces ateliers "correspondances" prennent ici, à Rambouillet, une saveur particulière : ceci grâce à un prolongement théâtral (ateliers de lecture expressive des textes écrits et reçus, par la comédienne Anne de Rocquigny). C'est ainsi que le 23 juin prochain, au Théâtre Le Nickel, aura lieu une lecture mise en espace, en voix, en corps, par les correspondants qui le souhaiteront : les écrivains se feront lecteurs.

Un exemple de lettre écrite par un "junior"...

Les seniors se lisent leurs lettres : celles reçues,
celles qui vont partir... Echange d'impressions
Cher « je ne sais pas qui »,

La dernière fois que j'ai connu une très grande chaleur, j'étais en train de faire des pizzas avec mon père et si vous voulez refaire la recette il vous faut : de la pâte à pizza, de la sauce tomate, du fromage et des champignons.

Et quand j'ai ouvert le four, de la fumée est sortie et j'ai eu très chaud à la langue lorsque j’ai goûté, alors j’ai bu beaucoup d’eau !    

Je ne sais pas si elle était très chaude ou si j'étais fier de ma pizza. Et vous comment ça va ? J'ai hâte d’être le 11 Avril pour vous rencontrer, pour savoir si vous êtes une fille ou un garçon.

Et  vous quel est votre grand souvenir de chaleur ?

Signé Kento


... Et un exemple d'une autre lettre, écrite cette fois par une "senior" :


Bonjour Antoine,


Les "seniors" et les "juniors" rivalisent de talent...
y compris pour la décoration des enveloppes !

Je m'appelle Françoise et  j'ai attendu ta lettre avec impatience.

Ton dessin avec le chameau est très joli.  J'ai découvert que  tu as eu plusieurs fois chaud et à différentes occasions !!

Moi je me souviens d'un jour où j'ai eu très chaud ! C'était l'été 1976.  Enfant, je passais chaque été à Mascousseil, un village de montagne situé en Lozère.

Depuis mes 9 ans,  j'ai pris l'habitude d'aller avec Pierre,  le boulanger. J'aimais bien être avec Pierre. C'était le  cousin de ma grand-mère. Chaque mardi après-midi, on partait tous les deux  faire  "la tournée dans la montagne" avec son vieux camion gris - le même que Louis la Brocante. On faisait un circuit de petits villages ou de maisons isolées pour aller vendre du pain, des gâteaux, des fruits, des graines pour les poules...  aux gens qui étaient loin du village, qui étaient âgés ou qui n'avaient pas de voiture.
Ce sont les juniors qui ont fabriqué, avec l'aide de leur
enseignante, cette magnifique boîte à lettres

En 1976,  Pierre et moi étions en short et en débardeur tellement il faisait chaud.  On appelle cela la canicule. Pour charger le camion, on faisait des allers-retours du  four où il faisait son pain et ses gâteaux à dehors. A 14h précises, on partait le camion  plein. Tout était réparti dans des caisses.  Hum, ça sentait bon dans le camion...  

Les deux sièges  étaient  recouverts de  plastique ; avec le soleil qui avait tapé dessus pendant des heures, ils nous brûlaient et nous collaient les fesses. Une fois habitués, on commençait par descendre nos vitres à la main  pour faire courant d'air et avoir moins chaud. Et nous voilà partis pour quatre heures de voyage...

Sortis du village, commençaient les montagnes, les ravins... Les caisses, mal calées, allaient de droite à gauche à chaque virage et  finissaient par faire une petite musique. On attendait avec impatience Puzenne. Dans cette forêt de pins, on avait de l'ombre pendant quatre kilomètres. La forêt était fraîche et sentait bon.

Le facteur est passé... Un junior en pleine lecture
de la lettre qu'il vient de recevoir
et à laquelle il va répondre
A la sortie de la forêt, on traversait le vieux pont du Doulou, la petite rivière, et de nouveau on se remettait à avoir chaud !! Adieu l'ombre !! Même les papillons avaient l'air d'avoir du mal à se déplacer !! De temps en temps, Pierre me prêtait son grand mouchoir à carreaux pour m'essuyer le visage car on transpirait beaucoup.

Lorsque qu'on arrivait quelque part, on klaxonnait pour annoncer notre arrivée. On s'arrêtait. On sautait du camion, on ouvrait les portes arrière  et là, j'oubliais pour un instant la chaleur. J'étais l'assistante de Pierre et je jouais à la marchande.

Partout nous étions bien accueillis. Les gens étaient heureux de nous voir, de parler et de nous acheter à manger.  Tous nous offraient à boire pour nous rafraîchir.  J'en ai bu des menthes à l'eau ce jour-là !!

Au plaisir de te lire,

Françoise

On en parle dans Les Nouvelles !







jeudi 20 mars 2014

Retour d'expérience : accompagnement en écriture

 L'Esperluette est un collectif associatif qui regroupe, Porte de Pantin à Paris, des compagnies de théâtre, des structures de production, des comédiens, des auteurs, des metteurs en scène...

A deux reprises, L'Esperluette m'a demandé de proposer à ses membres un accompagnement en écriture avec des temps collectifs alternés avec un coaching individuel, afin d'aider à l'avancée des projets personnels de chacun.

Il s'agissait généralement d'écriture théâtrale, et l'idée était de "mettre le pied à l'étrier". Certains des projets ont abouti à des créations (Givre, de Christine Spranger, par le Théâtre du Petit Matin, mise en scène à Evreux, L'Encens et le Goudron, de Violaine de Carné, par la compagnie Le Tir et la Lyre, en Avignon...).

J'ai également proposé à mes quatre compères auteurs du G5 d'animer un autre atelier d'écriture, toujours à destination de ce public sensibilisé au théâtre, afin d'avancer ensemble sur l'écriture d'une pièce écrite à partir d'articles de journaux. Chaque participant au stage passait deux jours avec chacun des auteurs du G5.

Cette "écriture du quotidien", c'est aussi ce que j'ai proposé, en 2012, à un petit groupe d'usagers de la bibliothèque de Cormontreuil (51), durant des rencontres régulières, le temps d'un automne.

J'essaye toujours, lors de ces sessions, de veiller à ce que l'écriture ne soit pas uniquement cérébrale mais reste connectée au corps (nous commençons par un échauffement, nous passons de l'écrit à l'oral...), de ne pas séparer l'activité d'écriture de celle de la lecture dans un va-et-vient curieux et gourmand avec des auteurs ayant un rapport avec le projet d'écriture, et enfin de décloisonner les types d'écriture (poésie, théâtre, récit, nouvelle, journal...), encourageant l'écrivant à se jouer des cases et des genres pour toujours mieux affirmer sa propre parole.