Mon territoire
En posant pieds à terre et nez en l'air, la caresse nerveuse
de ce bon vieux mistral s'est engouffrée en me pénétrant ardemment cœur et corps.
Est-ce que je savais qu'il m'était possible de retricoter ce
lieu dont je me suis rendue coupable d'abandon ? L'espace d'un instant, il me
plaît d'arpenter ces poussières
de souvenirs accumulées en moi. Je suis là. Tu es là. Je ne te connais plus, ni ne te
reconnais. Et toi, te souviens-tu de ma petite personne ?
Pourquoi me regardes-tu au travers de tes yeux des rues
froides, figées, désertiquement désertées ? Pourquoi me prives-tu des rires
enfantins, des discussions de tes métallurgistes en grève ou du boucan
terrifiant et assourdissant des métaux, des effluves enivrantes de lavande, du
chuchotement de tes boîtes de carton, du frémissement de celles en satin..., du
parfum qu'elles devaient contenir en d'autres lieux, des regards du dedans des
vitrines, du ... ?
Ah ! Vaurias de mon enfance ! Comme tu étais vive,
turbulente, belle, jeune, enthousiaste, rieuse ... sage comme la vieillesse,
bonne comme le bon pain sous les vapeurs de la
locomotive de grand-père et comme tu...
Quoi ! Lou mistrau, tu me bouscules, me frappes, me gèles,
me brûles, m'empoussières... dans le
tourbillon de ta grande vengeance qui n'a pu frapper plus tôt.
Extrait de
"L'espace d'une vie de femme"
De Giselle MUSICIEN le jeudi 25 septembre 2014
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