jeudi 13 décembre 2012
L'écriture mode d'emploi
D'octobre à décembre 2012, avec des étudiants de l'ENASS (Ecole Nationale des Assurances), nous avons construit peu à peu une "maison texte" en commençant par accumuler du matériau, comme autant de briques textuelles :
- A partir des lieux de l'enfance de chacun d'abord, un inventaire le plus exhaustif possible, puis à partir de l'un de ces lieux, un récit autobiographique...
- Puis à partir de reproductions d'Edward Hopper mettant en jeu des lieux d'habitation, des personnages... En faisant marcher ses cinq sens... Laisser venir un début de situation dramatique (comme le propose si justement Alain Knapp dans son ouvrage AK, une Ecole de la Création Théâtrale) ;
- A partir d'un article de journal également, imagination d'une mise en jeu théâtrale en choisissant un point de vue subjectif : dialogue, monologue... et pourquoi pas, dans un deuxième temps, la proposition d'une forme poétique en contrepoint ;
- D'autres matériaux aussi, construits à partir d'odeurs (à la manière des Parfums de Philippe Claudel) ou de moments significatifs, liés à des lieux précis de notre histoire ("Où étiez-vous le 11 septembre 2001 ?").
Peu à peu des lieux, des temps, des protagonistes émergent...
Et en faisant se rencontrer les textes, on peut leur assigner les pièces d'une maison, à la manière de Georges Perec dans sa Vie Mode d'Emploi. C'est un travail d'ordonnancement un peu fastidieux, comme le montrent ces images... Mais en quelques heures, on peut, en imaginant des liens entre les personnages, les faire se rencontrer dans cette maison, sur une durée de 24 heures. Pas mal d'élagages, des transformations, pour qu'à l'arrivée le texte produit nous mène au seuil d'une fiction : de toute cette construction, une histoire commence à naître.
> Laurent Contamin
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Pays/territoire :
La Défense, France
mardi 30 octobre 2012
Révélations
(c) Laurent Contamin |
L'imagination était au rendez-vous : parmi les textes produits, on trouve la découverte d'une délation qui a eu lieu entre voisins et qui eut à l'époque des conséquences tragiques, un secret que l'effondrement des tours du World Trade Center en 2001 faillit ensevelir à jamais, l'amour d'un professeur envers sa dulcinée qui parvient enfin à se dire, au prix d'une inversion du cours du temps - rien de moins ! -, le legs par un vieillard à ses petits-enfants de son amour de la nature, une amitié amoureuse qui ose enfin dire son nom, une très mauvaise blague entre deux soeurs qui n'ont pas froid aux yeux, l'apaisement d'un sapeur-pompier qui apure ses comptes avec son passé...
Ces textes, écrits avec le soutien de l'enseignante Mme Sauvage, seront mis en voix par les lycéens de Gustave Eiffel dans le cadre d'un atelier animé par la comédienne Sandra Macedo et coordonné par Olivier David, pour une étape de travail en compagnie d'élèves d'écoles primaires le 19 décembre... Suite de l'aventure début 2013 avec la mise en scène de ce travail par Olivier David.
> Laurent Contamin
Pays/territoire :
Ermont, France
vendredi 17 août 2012
Réduction
Un roman de 500 pages réduit à... une page. Exemple d'une écriture collective (5 adultes), dans le cadre d'un atelier mené à la médiathèque de Cormontreuil (Marne), en novembre 2011 :
(c) Laurent Contamin |
"Au commencement de ma vie, ma scolarité fut marquée par un jugement récurrent qui devait la symboliser : Peut mieux faire.
J’aimais trop vagabonder dans les environs du village et
surtout dans les souterrains du vieux château fort.
Jusqu’à mon treizième
anniversaire.
Cette année-là en effet, Charles-Arthur vint habiter en face de chez moi
et fréquenta assidûment notre maison.
Il m’ouvrit à l’archéologie.
Ce
fut pour moi une rencontre déterminante ; cet homme m’avait réconcilié
avec moi-même en posant sur moi un regard bienveillant, en transformant mon défaut de vagabondage en qualité
d’explorateur et de découvreur du passé.
A
ses côtés, je me sentais grandir de jour en jour.
Notre
différence d’âge a toujours été un souci pour lui. Pas pour moi.
Il était mon modèle et j’ai réussi grâce à lui.
Me voici à présent
à l’orée de ma retraite, assez fier du déroulement de ma vie, car je lis sur le
carnet de notes de ma petite fille : Excellent travail, réussira !
J’ai la prétention alors de penser que Charles-Arthur
n’est pas pour rien dans ces quelques mots."
Un recueil avec l'ensemble des textes écrits par les participants est tenu à la disposition du public à la médiathèque de Cormontreuil (51)
Un recueil avec l'ensemble des textes écrits par les participants est tenu à la disposition du public à la médiathèque de Cormontreuil (51)
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Pays/territoire :
Cormontreuil, France
lundi 18 juin 2012
Faits divers
La classe de 3ème B du collège Calmette |
Abdel évoque, dans un travail sur le rythme des mots, les drames de la précarité :
Seule - heure - long - peur - intermittent
Deux - mois - peur - portes - auparavant
Chômage - futur - perversité
Explosion - avenir
Vulnérabilité
Kelly et Grégory ont été touchés par le meurtre de soldats français en mission en Afghanistan et en ont fait un haïku :
Des militaires mitraillés
Dans une vallée
Où la paix devait régner.
> Laurent Contamin
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Limoges, France
jeudi 3 mai 2012
Des textes qui n'avaient pas de nom
Réponse à un questionnaire sur ma résidence en collège, Beaumont-sur-Oise, 2010/11 :
La question de la formation, des origines :
"J’anime pas mal d’ateliers d’écriture depuis une dizaine d’années, notamment en lycées (général et professionnel), avec des étudiants, des jeunes dits "en difficulté", des comédiens, des usagers de bibliothèques… J’avais beaucoup plus rarement pratiqué l’atelier d’écriture avec des enfants et adolescents.
J’ai été très peu formé : J’ai suivi quelques ateliers d’écriture animés à l’époque au Théâtre de l’Est Parisien par Michel Azama, c’était en 1994. J’ai échangé avec des collègues, notamment Bruno Allain et Dominique Paquet, sur la pratique d’atelier. Et pour ce qui est des lectures, on en revient toujours au François Bon, c’est vrai, Tous les Mots sont adultes, qui a ceci d’inépuisable qu’il n’est pas un catalogue de recettes mais un livre qui se déploie et se re-déploie en permanence, qu’il ouvre et interroge, et puis quelques autres, dont celui d’Alain Knapp, A.K, Une École de la Création Théâtrale, qui m’a sensibilisé à un cheminement de pensée intéressant et fécond.
La particularité de ma résidence, c’est qu’elle était longue, puisque j’étais au collège sur toute l’année scolaire, donc de septembre à juin. Les demandes des enseignants étaient diverses : parfois c’était juste un atelier de deux heures, une seule fois. Parfois c’était un rendez-vous régulier, sur deux mois. Parfois encore ce fut plus long, comme avec cette classe de 4ème qui a écrit Voix d’Eau, un texte mis en voix en fin d’année à la Fondation Royaumont. Le travail évidemment s’organisait différemment selon..." > Lire la suite
> Laurent Contamin
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Beaumont-sur-Oise, France
vendredi 6 avril 2012
Vers où va le vert ?
Un atelier que j'ai mené au Théâtre Canter de Saint-Denis de la Réunion avec les compagnons du Théâtre du Grand Marché, en 2008 : merci à Cécile, Vaite, Marie, Auaco et Vincent (Fontano) qui ont écrit un très beau texte choral à partir de nos séances d'atelier, intitulé "Vers où va le vert ?", et qui commence ainsi :
Les champs endormis
Se colorent de vert.
VINCENT :
D’abord, il y a un champ de cannes immense et vert qui respire à chaque passage
du vent. Puis il y a une rivière qui murmure. Il y a une route silencieuse car
elle est seule. Et surplombant le tout, une vieille porte en bois qui grince.
Une vieille porte en bois que l’on n’a pas eu le temps de peindre, ni de
poncer, une vieille porte en bois qui regarde mais que l’on ne regarde pas.
Derrière cette porte, il y a moi. C’est une porte à battants. Enfant, je me
disais que ce nom devait lui venir du bruit sourd et sec qu’elle faisait en se
cognant au vent. Le bruit d’une claque rapide et violente. Du genre que l’on
donne aux gens trop curieux. Trop curieux de voir ce qu’il y a après cette
porte-là, après cette porte il y a moi. Derrière ma porte, je regarde la nuit
habiller le monde. Le champ de cannes s’essouffle et la rivière semble vouloir
parler. Je ferme la porte. Pas de serrures, pas de clefs, pas de cadenas qui
protège l’entrée. Juste un bout de bois. Un bout de bois allongé : le
battant. Il maintient les deux volets. Au pied de ma porte, des mites
invisibles ont fait festin ; elles l’ont rongée, ma porte. Si bien qu’en
étant attentif, on voit la lune laisser traîner sa main. Là, allongé sur mon
lit, je surveille la lune. Plutôt les ombres qu’elle dessine. Savent-elles que
je suis là ? Je ne les entends pas marcher mais je les vois, les ombres
traversent la lumière lunaire ; au pied de ma porte, assis en tailleur, je
ne dors pas, j’attends. Si elles essaient d’entrer, je sais que ma porte ne se
donnera pas, pas comme ça. C’est une porte battante, elle se battra, elle me
défendra, elle sait qu’après elle il y a moi.
VAITE
La porte d’entrée de la maison de mes grands-parents le jour où mon oncle est
rentré déguisé en Père Noël / la
porte d’entrée de la chambre funéraire / la
porte des vestiaires à la piscine l’été / mon
père derrière la porte de la maison / les
portes cassées de mon frère / la
porte de la voiture qui claque sur les doigts / la
porte du train qui se ferme / la
porte du train qui s’ouvre / la
porte du lycée où je me suis appuyée...
.../...
> Laurent Contamin
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> Laurent Contamin
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